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La ruche de Berra


Une ruche de Francesco Berra en Ariège
Une ruche de Francesco Berra en Ariège

« Cette ruche a été conçue afin de faciliter surtout la formation d’essaims artificiels selon le système adopté avec grand avantage sur l’île de Favignana depuis l’Antiquité. [Il s’agit de la ruche couchée en férule, utilisée couchée, qui avait été apportée en Sicile par les Phéniciens].

 

Fig.1. La ruche à cadres, de Francesco BERRA, dans « La coltura delle api, coll’uso dell’arnia a listelli », paru à Novara, en 1864. Cette ruche se caractérise par l'utilisation de "listelli", ou petites lattes de bois, qui servent de support aux rayons de cire construits par les abeilles. Cette conception vise à faciliter la gestion de la ruche et l'inspection des colonies, tout en respectant les comportements naturels des abeilles ».
Fig.1. La ruche à cadres, de Francesco BERRA, dans « La coltura delle api, coll’uso dell’arnia a listelli », paru à Novara, en 1864. Cette ruche se caractérise par l'utilisation de "listelli", ou petites lattes de bois, qui servent de support aux rayons de cire construits par les abeilles. Cette conception vise à faciliter la gestion de la ruche et l'inspection des colonies, tout en respectant les comportements naturels des abeilles ».

C’est un parallélépipède rectangulaire mesurant intérieurement 73 cm de longueur, 25 de largeur, et 23,5 de hauteur du bas aux lattes qui forment le plafond. La ruche peut être construite avec des planches d’une épaisseur d’environ deux centimètres, en épicéa (Pinus picea) ou en mélèze, de sorte qu’elle a une grande résistance et une plus grande durée. Les deux extrémités sont fermées par des panneaux qui forment la façade avant et arrière. Ils sont pourvus, dans le bas, d’une ouverture suffisante pour l’entrée et la sortie des abeilles, qui peut être remplacée par une trappe. De petits trous sont ménagés pour la ventilation, dans la fermeture de la trappe avant, au cas où elle doit être baissée. L’arrière, presque toujours complètement abaissée, n’est soulevée que pour introduire de la fumée avec l’enfumoir prévu à cet effet, afin de repousser les abeilles à l’avant de la ruche, chaque fois que les différentes opérations de récolte l’exigent. Le couvercle de la trappe arrière est ensuite maintenu toujours légèrement surélevé de quelques millimètres, pour être averti de la présence de mites de teigne, les abeilles ayant l’instinct singulier d’expulser de la ruche tout ce qui est contraire à la propreté ou nuisible à la salubrité de leurs nids, comme les débris de leur couvain ou les excréments de la mite. Ces excréments, chassés par les abeilles vers le léger soulèvement de la fermeture de la trappe, ne peuvent pas, comme cela se produirait par celle de devant, être éliminés par ce passage de sorte qu’en s’accumulant à cette entrée de la ruche, ils donnent une indication certaine de la présence du papillon.


Fig.2.  La ruche de Francesco Berra a été influencée par les travaux de Dzierzon qui, en 1848, a été le premier apiculteur à installer dans ses ruches, des bandes de bois amovibles à extraction horizontale basée sur le principe de l'espace abeille, ce qui permettait d’observer directement l’intérieur de la ruche et d’obtenir un rendement en miel plus élevé sans en détruire l’ensemble des constructions. À la même époque, le baron August de Berlepsch prolongera les barrettes par des supports transversaux et verticaux qui améliorent la mobilité de la ruche (Bienen-Zeitung, mai 1852). Nous retrouverons barrettes et cadres dans la ruche de Francesco Berra, une adaptation modernisée de la ruche couchée en férule sicilienne dont la conduite permettait  déjà « la formation d’essaims artificiels selon le système adopté avec grand avantage sur l’île de Favignana depuis l’Antiquité ». Musée de Fleury-d’Aude. 
Fig.2.  La ruche de Francesco Berra a été influencée par les travaux de Dzierzon qui, en 1848, a été le premier apiculteur à installer dans ses ruches, des bandes de bois amovibles à extraction horizontale basée sur le principe de l'espace abeille, ce qui permettait d’observer directement l’intérieur de la ruche et d’obtenir un rendement en miel plus élevé sans en détruire l’ensemble des constructions. À la même époque, le baron August de Berlepsch prolongera les barrettes par des supports transversaux et verticaux qui améliorent la mobilité de la ruche (Bienen-Zeitung, mai 1852). Nous retrouverons barrettes et cadres dans la ruche de Francesco Berra, une adaptation modernisée de la ruche couchée en férule sicilienne dont la conduite permettait  déjà « la formation d’essaims artificiels selon le système adopté avec grand avantage sur l’île de Favignana depuis l’Antiquité ». Musée de Fleury-d’Aude. 

La ruche « Férula », Doc. Gaby Roussel, années 2007-2012.


Un panneau est constamment fixé à la trappe de devant et porte deux crochets en fer afin de le maintenir, s’il est nécessaire de l’abaisser temporairement. Ce panneau doit pouvoir être fixé avec une vis appropriée, lorsqu’il est nécessaire de transporter la ruche sur une distance considérable. Dans la partie supérieure, la ruche est équipée d’un couvercle mobile munie de gonds, prévu pour procéder aux différentes opérations de culture, ce qui est facilité par les têtes de cadres mobiles sous-jacentes, qui forment le plafond de la ruche, comme nous le verrons ci-dessous.


Ce plafond est divisé en trois parties, dont les deux extrêmes peuvent être ouvertes indépendamment de celle du milieu, [il s’agit d’une grille qui divise la ruche en deux parties égales] auquel les fermetures sont ajustées, soit pour soulever ou enlever les fermetures placées dans les façades avant et arrière, soit au moment de récolter ou d’effectuer les travaux nécessaires, soit pour administrer de la nourriture aux abeilles. Une boîte mobile équipée de crin de cheval, d’un volume égal à celui de huit têtes de cadres, est alors placée à l’endroit qui semble le plus convenable. Dans notre région, il est très rarement nécessaire de l’utiliser, et il est prévu plus par précaution que pour une réelle utilité.


Le plafond de la ruche est formé d’une série de têtes de cadres parallèles, d’un centimètre de largeur, se touchant les unes aux autres et mobiles, d’une même longueur de vingt-six centimètres, de sorte que l’une peut être substituée à l’autre dans toutes les ruches. Dans les parois latérales, une rainure est pratiquée immédiatement sous le couvercle principal pour les soutenir. Ces têtes de cadres, qui caractérisent particulièrement ma ruche et constituent son plus gros avantage, permettent d’extraire facilement les rayons, un à un, sans aucun dommage, afin de choisir ceux qui seront nécessaires à la formation d’essaims artificiels, débarrasser  de la teigne ceux qui en sont infestés ou autrement endommagés, les remettre à leur place d’origine, si nécessaire, et enfin effectuer toutes les différentes opérations de la conduite d’une ruche ». Francesco Berra.


Cette ruche représente une étape importante dans l'évolution de l'apiculture rationnelle au XIXᵉ siècle, contribuant à l'amélioration des pratiques apicoles en Italie et au-delà.

Modifiée par Berlepsch (il n’avait pas la ruche couchée / à reprendre donc) elle consistait en une boîte ouvrable aux deux extrémités, avec des parois de 3 cm d’épaisseur et mesurant intérieurement 72 cm de long, 28 cm de large et 24 cm de haut. C’est celle que les apiculteurs piémontais se voyaient alors proposer. en même temps que l’ “apiarnia Magni”, inventée par Magni, en 1856, une ruche verticale qui a fait l’objet de diverses modifications et améliorations par les apiculteurs italiens, donnant naissance à une série de nombreux modèles qui sont apparus dans des expositions apicoles et qui ont été ponctuellement décrits dans les numéros de « L’apicoltore ». Bientôt, cependant, les ruches « Sartori » et « Fumagalli » ont constitué la base de l’apiculture rationnelle italienne jusqu’au début des années 1900, lorsqu’elles ont progressivement cédé la place à des ruches de type américain, la Langstroth et la Dadant. Le renouveau de l’apiculture italienne a donc été affecté par l’influence allemande de 1860 à 1885 et par l’influence américaine de 1885 à 1927.

 


Fig.3.  Une ruche divisible utilisée à Burret. Probablement inspirée de la Warré créée en 1923 par l'abbé Émile Warré, elle présente quelques similitudes avec la Berra : les crochets de fixation, par exemple, les encoches recevant les baguettes, mais aussi l’emploi de baguettes et non de cadres, comme l’indiquent les traces de constructions des abeilles sur les parois. Dimensions extérieures : Corps : largeur, 40 cm ; profondeur, 35 ; hauteur, 35 ; 24 cm. pour la hausse : La Warré, également modulaire, fonctionne avec 8 barrettes de 25 mm de large et non des cadres. Cela la rend peu coûteuse (pas d'achat régulier de cadres ni de cire gaufrée). Certains apiculteurs préfèrent cependant utiliser des cadres. (Musée de Fleury).
Fig.3.  Une ruche divisible utilisée à Burret. Probablement inspirée de la Warré créée en 1923 par l'abbé Émile Warré, elle présente quelques similitudes avec la Berra : les crochets de fixation, par exemple, les encoches recevant les baguettes, mais aussi l’emploi de baguettes et non de cadres, comme l’indiquent les traces de constructions des abeilles sur les parois. Dimensions extérieures : Corps : largeur, 40 cm ; profondeur, 35 ; hauteur, 35 ; 24 cm. pour la hausse : La Warré, également modulaire, fonctionne avec 8 barrettes de 25 mm de large et non des cadres. Cela la rend peu coûteuse (pas d'achat régulier de cadres ni de cire gaufrée). Certains apiculteurs préfèrent cependant utiliser des cadres. (Musée de Fleury).

 





























Des immigrés italiens l’auraient-ils importée en Ariège ?

« L'immigration italienne en Ariège s'inscrit dans un mouvement plus large d'installation d'Italiens dans le sud-ouest de la France, particulièrement entre les années 1920 et 1930. Durant cette période, la région a connu une arrivée massive d'Italiens, passant de moins de 3 000 en 1921 à plus de 83 000 en 1936, représentant ainsi 41 % des étrangers présents dans la région.

Dès l'après Première Guerre mondiale, des groupes d'ouvriers forestiers italiens étaient déjà présents, en Ariège, avant même le début de la migration agricole. Par exemple, ils étaient actifs dans les forêts de Montségur et de Bélesta. Ces travailleurs, souvent originaires des hautes vallées du Piémont, étaient recrutés pour des tâches exigeantes telles que l'abattage en montagne, un travail que peu de locaux souhaitaient entreprendre en raison de sa rudesse. Cette immigration italienne a laissé une empreinte durable en Ariège, tant par son impact économique que par les liens culturels tissés au fil des décennies ».

 

Concernant spécifiquement le village de Burret, les sources disponibles ne mentionnent pas explicitement la présence d'immigrés italiens. Cependant, étant donné la tendance générale de l'époque, il est possible que des Italiens se soient installés ou aient travaillé dans cette région. Une recherche plus approfondie commanderait, bien évidemment, de consulter les archives locales ou de contacter des historiens spécialisés dans l'histoire de l'Ariège.

 

Deux ruchers deux moments de l’apiculture en Ariège

Le rucher de Trabet (Fig.4) est exemplaire pour représenter l’apiculture traditionnelle en Ariège. La ruche dominante y est le tronc de châtaignier. C’est exactement celle que signale W. Giuliano dans sa recherche « Pour un musée de l’apiculture en Piémont ».  C’est celle qui a prévalu jusque dans les années cinquante, époque où la ruche à cadres s’est imposée en même temps que disparaissaient les petits ruchers familiaux installés en bordure de potager.

 

 Fig.4.  Le rucher de Trabet, en Ariège, et les ruches en tronc de châtaignier encore en usage signalées par W. Giuliano dans « Pour un musée de l’apiculture en Piémont », 1982.
 Fig.4.  Le rucher de Trabet, en Ariège, et les ruches en tronc de châtaignier encore en usage signalées par W. Giuliano dans « Pour un musée de l’apiculture en Piémont », 1982.













Le rucher de Burret mérite donc une attention particulière. Boris Cabrol y a relevé la liste des ruches qui y étaient en service : 5 ruches-tronc, 1 buc en planche, que nous pouvons qualifier d’universelles, 4 divisibles verticales, probablement inspirées de la Warré, 3 horizontales,  où l’on retrouvera la ruche de Berra, 1 artisanale de format inconnu, peut-être imitation de la Voirnot dont l’usage est signalé dans le n°57 de « L’Ariège pittoresque », et qui pourrait être la ruche de la fig.3, soit 14 ruches.


Le rucher-couvert de Burret, en Ariège.
Le rucher-couvert de Burret, en Ariège.

Il s’agit d’un rucher à qualifier de transition, où la tradition est représentée par les six bucs en tronc d’arbre ou en planche, mais où un essai d’adaptation du mobilisme est manifeste, même si le cadre imaginé par Berlepsch n’y remplace pas toujours la barrette conçue par Dzierzon. Ce sont les trois « ruches horizontales » qui en représentent la particularité. On pourrait penser à une réflexion sur la ruche couchée de Layens, que l’on retrouvait aux côtés de la Dadant, dans les ruchers-couverts des châteaux de la fin du XIXe siècle dont un des plus beaux exemples se trouve justement en Ariège, à Lagarde, au château de Sibra, mais elle est trop élaborée pour ne pas faire penser à un apport extérieur, probablement de Piémontais qui dominaient la conduite de la ruche de Berra.


Cabrol Boris et Courrēnt Jean, Mars 2025.



Fig.1.  La ruche à cadres, de Francesco BERRA, dans « La coltura delle api, coll’uso dell’arnia a listelli », paru à Novara, en 1864. Cette ruche se caractérise par l'utilisation de "listelli", ou petites lattes de bois, qui servent de support aux rayons de cire construits par les abeilles. Cette conception vise à faciliter la gestion de la ruche et l'inspection des colonies, tout en respectant les comportements naturels des abeilles ».


Fig.2.  La ruche de Francesco Berra a été influencée par les travaux de Dzierzon qui, en 1848, a été le premier apiculteur à installer dans ses ruches, des bandes de bois amovibles à extraction horizontale basée sur le principe de l'espace abeille, ce qui permettait d’observer directement l’intérieur de la ruche et d’obtenir un rendement en miel plus élevé sans en détruire l’ensemble des constructions. À la même époque, le baron August de Berlepsch prolongera les barrettes par des supports transversaux et verticaux qui améliorent la mobilité de la ruche (Bienen-Zeitung, mai 1852). Nous retrouverons barrettes et cadres dans la ruche de Francesco Berra, une adaptation modernisée de la ruche couchée en férule sicilienne dont la conduite permettait  déjà « la formation d’essaims artificiels selon le système adopté avec grand avantage sur l’île de Favignana depuis l’Antiquité ». Musée de Fleury-d’Aude. 

La ruche « Férula », Doc. Gaby Roussel, années 2007-2012.

 

Fig.3.  Une ruche divisible utilisée à Burret. Probablement inspirée de la Warré créée en 1923 par l'abbé Émile Warré, elle présente quelques similitudes avec la Berra : les crochets de fixation, par exemple, les encoches recevant les baguettes, mais aussi l’emploi de baguettes et non de cadres, comme l’indiquent les traces de constructions des abeilles sur les parois. Dimensions extérieures : Corps : largeur, 40 cm ; profondeur, 35 ; hauteur, 35 ; 24 cm. pour la hausse : La Warré, également modulaire, fonctionne avec 8 barrettes de 25 mm de large et non des cadres. Cela la rend peu coûteuse (pas d'achat régulier de cadres ni de cire gaufrée). Certains apiculteurs préfèrent cependant utiliser des cadres. (Musée de Fleury).

 

 Fig.4.  Le rucher de Trabet, en Ariège, et les ruches en tronc de châtaignier encore en usage signalées par W. Giuliano dans « Pour un musée de l’apiculture en Piémont », 1982.

Le rucher-couvert de Burret, en Ariège.



Bibliographie

Associazione Museo dell'Agricoltura del Piemonte, « Per un Museo dell’Agricoltura in Piemonte, Vol.III, Passato e Presente dell’Apicoltura Subalpina », 1983.

Brückner Dorothea , « Sicile apiculture traditionnelle », Bâtir pour les abeilles, actes des rencontres de St Faust 1998 : pages 154 à 157.

Courrēnt Jean, « Quand l’apiculture audoise changea de siècle », Les Cahiers d’Apistoria, n° 4-5, 2005-2006.

Courrēnt Jean, « Les ruchers de l’Abeille au Bois Dormant »,  Cahiers d’Apistoria, n° 14, 2015.

Marletto Franco, « Inizio ed evoluzione dell’apicoltura razionale in Piemonte », Associazione Produttori Miele Piemonte, 1982.

Masetti Nino, « Apiculture traditionnelle en Sicile : Itinéraires », Les Cahiers d’APISTORIA N° 2, 2003, pages 34 à 52.

Mazzone Pascale et Persano Oddo Livia, « Apicoltura e Mieli della Campania », 2003.

Roussel Gaby, « Apiculture traditionnelle en Sicile avec la ruche Férula »,  Société Centrale d’Apiculture, 2009.


 
 
 

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